lundi 24 mars 2014

Les visages de Dieu


D'Amédée Mallock
Aux Editions Pocket


S’il est une qualité qu’il faut reconnaitre à Mallock c’est bien sa capacité à étonner ses lecteurs à chacun de ses ouvrages. Il n’est pas un de ses livres qui ressemblent à un autre, son imagination et sa créativité semblent sans limite.
Après avoir lu « Le cimetière des hirondelles «  et les « Les larmes de Pancrace»,  je me suis plongée dans « Les Visages de Dieux » pensant retrouver une trame identique à celles de deux premiers ouvrages (derniers ouvrages seraient plus juste –dans la mesure où «  Les Visages de Dieu » est son tout premier opus), il n'en est rien. La construction de son histoire est très différente puisque l’on ne découvre le coupable qu’à la fin du livre.
Il est ici question d’un tueur en série, surnommé le « Maquilleur » créateur d’icônes pour sa quête de la perfection dans le vrai visage de Dieu. Mallock va  devoir se pencher sur des crimes atroces, perpétrés depuis plusieurs décennies et à travers plusieurs continents. Le « maquilleur » revient après quelques deux cent crimes commis, non élucidés. Alors copycat ? Ou bande organisée ? C’est ce que va s’employer à découvrir l’équipe du « 36 ». Du suspens, de la tension, de l’hémoglobine, trois ingrédients qui rendent ce thriller captivant. A l’instar de tous les ouvrages de l’auteur, on tourne les pages avec rapidité, avidité même, sans qu’aucun temps mort ne vienne perturber la lecture.

Pourtant peu accro aux thrillers, je suis accro à Mallock, à sa qualité d’écriture et son inventivité. Je suis certaine que cet auteur n’a pas fini de nous surprendre. 

mercredi 12 mars 2014

Comment braquer une banque sans perdre son dentier



De Catarina Ingelman-Sundberg

Chez Fleuve Editions

Imaginez le club des cinq… Mais pas celui de la bibliothèque rose, là ce serait plutôt celui de la bibliothèque vermeil.
Cinq retraités en pension dans une résidence pour personnes âgées se révoltent contre les restrictions imposées par la direction de l’établissement.  La petite bande de malfrats en devenir, décide donc de commettre un délit pour accéder à la prison qui semble, selon eux,  un sort plus enviable que la maison de retraire. Du petit larcin au casse du siècle, les papis voleurs  vont se laisser prendre au jeu et profiter de leur grand âge pour duper les policiers.
Le lecteur se laisse embarquer dans une comédie burlesque où la fantaisie du scénario se mêle à la détermination et au courage des protagonistes. Des scènes drôles et cocasses se succèdent pour former une histoire rocambolesque. Et bien que l’on peine à croire parfois qu’ils puissent fomenter de tels actes, ils n’en sont pas moins touchants et attachants.
Dans cette comédie légère, deux  sujets cependant sont à peine effleurés par l’auteur mais pourtant bien réels ; le sort réservé à nos ainés dès lors qu’ils ne sont plus actifs et les restrictions qu’imposent ces établissements contre marge et profit au détriment souvent du bien être des pensionnaires.
Ce sont deux messages que l’auteur réussit à transmettre sans compromettre la bonne humeur qui règne tout au long du récit mais qui donnent tout son sens à cette histoire


vendredi 7 mars 2014

La petite communiste qui ne souriait jamais

De Lola Lafon

Aux Editions Actes Sud

En 1976, lors des jeux Olympiques de Montréal, une petite gymnaste venue du fin fond de l’Europe de l’Est, marquait à jamais les esprits des spectateurs et téléspectateurs.  Certains se rappellent encore les prouesses réalisées par cette enfant menue, coiffée de couettes, sanglée dans un justaucorps immaculé, dont les notes élevées firent exploser les compteurs.  Ce jour- là, une étoile était née. Nadia Comaneci, jeune enfant de 13 ans dont le destin allait marquer toute une génération de petites filles,  entrait dans la légende des jeux.
C’est l’histoire que nous raconte Lola Lafon, fascinée par le parcours de Nadia Comaneci. Mais si sa vie relève en partie du rêve, un autre aspect, plus sombre  nous est révélé par l’auteur en créant une relation fictive avec la gymnaste, par l’alternance de faits réels et de dialogues imaginaires avec Nadia tout au long du roman.

Remarquée très tôt par son très controversé entraineur Bela,  Nadia est la figure de proue de l’équipe de gymnastique roumaine. Programmée pour gagner des médailles, elle devient grâce aux jeux de 1976, l’emblème victorieux de l’Empire de Ceaucescu.
Mais la légère petite fille qui excelle à la poutre et aux barres parallèles subit les bouleversements de la puberté. Elle engage alors une lutte, frôlant la maladie, pour rester la fillette qui avait séduit le monde entier. Soumise à son entraineur, soumise au régime de Ceaucescu, soumise à Nicu Ceaucescu lui-même, soumise enfin à une Roumanie communiste, pays où l’on ne naissait pas libre, elle devient le jouet de la scène politique internationale, le faire valoir du dictateur.

Lola Lafon retrace la vie d’une petite fille devenue adulte, de son ascension à son déclin et nous offre un parallèle entre la société que fut cette Roumanie communiste un pays où l’on  manquait de tout, et ce monde de consommation dans lequel nous évoluons aujourd’hui où rien ne manque, mais qui nous enferme dans le besoin d’obtenir toujours plus.
Avec une écriture maitrisée, Lola Lafon nous livre un ouvrage d’une grande qualité et grâce au risque qu’elle s’est autorisée en inventant les échanges avec Nadia, elle laisse au lecteur le loisir d’imaginer ce que fut vraiment la vie de la gymnaste ; a-t-elle été une victime du régime ou au contraire une parfaite opportuniste comme certains la décrivent ?


lundi 3 mars 2014

Demain ne suffit pas


De Fanny Leblond

Aux Editions Passiflore

Alfred, 45 ans, toujours sous le joug de sa mère est un homme sans éclat et sans surprise. Il subit son quotidien fade et sans relief en ne s’autorisant aucune fantaisie ou presque. Sa seule extravagance est d’épier ses collègues féminines autour de la machine à café, et d’enregistrer à leur insu, leur conversation sur son téléphone. Le soir, dans le confinement de son petit appartement,  il réécoute ses quelques instants volés,  et  s’imagine un autre avenir.
Un jour cependant,  une mauvaise nouvelle va déstabiliser le cours de sa vie. Et sous le choc, en l’espace de quelques jours, il va chambouler son univers sans aucune maîtrise, au point même de ne plus se reconnaitre.

Avec ce deuxième ouvrage Fanny Leblond nous emporte dans la fantaisie et l’humour. Mais si le récit semble fantasque,  la réalité l’est un peu moins. Cette légèreté apparente ne serait-elle pas là justement pour contrebalancer la gravité du sujet de fond abordé dans ce roman ? A savoir, les frustrations que l’on s’impose dans la vie, souvent générées par notre éducation ou les jugements portés par nos pairs, sont-elles vraiment nécessaires ?
Ne devrait-on pas finalement vivre chaque instant comme s’il était le dernier sans nous préoccuper du regard des autres ?

Un ouvrage à mettre dans les mains de ceux qui rêvent leur vie sans jamais s'autoriser à la vivre vraiment.

mercredi 26 février 2014

Les larmes de Pancrace

d'Amédée Mallock

Edité chez Fleuve Editions


Si j'avait été séduite par l'originalité du livre "Le cimetière des hirondelles", le nouvel ouvrage d'Amédée Mallock,  "Les larmes de Pancrace" dépasse de loin ce que j'avais imaginé.
Nous sommes à nouveau face à un polar littéraire auquel vient s'ajouter une dimension historique.

Sollicité par un de ses amis et ancien collègue durant ses vacances à proximité du Bassin d'Arcachon, l'attachant et débonnaire commissaire reprend du service. Un meurtre a été commis dans une propriété viticole non loin de son lieu de villégiature. Il va s'attacher à résoudre une enquête dont les enjeux politiques effraient tous les membres du corps judiciaire. Mais c'est sans compter sur la perspicacité et la pugnacité du brillant commissaire. 

Rien n'est laissé au hasard dans ce livre. De l'histoire du vin et des vignes puisque nous sommes en terres bordelaises, en passant par l'histoire des Templiers à la veille de la guerre de cent ans, jusqu'aux preuves scientifiques, tout est intelligemment pensé.
Car au-delà de l'astucieux scénario et de l'intrigue brillamment écrite, on comprend le travail qu'à dû fournir l'écrivain pour étayer son propos. Un travail de recherche historique et scientifique fouillé pour rendre ce roman crédible.

Mallock passe avec aisance d'une époque à une autre, alternant chapitres moyenâgeux et contemporain. Il distille avec parcimonie quelques indices, développe son récit, expose des théories, et d'un rythme soutenu, place le lecteur au cœur de l'histoire qui devient tour à tour criminel, juge ou inspecteur et se retrouve embarqué dans l'élucidation d'une histoire vieille de plusieurs siècles.
Et c'est justement grâce à la cohérence et à la fluidité du récit que Mallock nous tient en haleine de la première page jusqu'au dénouement final. Ce dernier acte où il porte l'estocade armé d'arguments et de preuves irréfutables laisse le lecteur à la fois pantois et admiratif. J'irais même jusqu'à qualifier ce dernier chapitre de jubilatoire.

Bravo à Mallock pour ce nouvel opus, qui confirme si tant est que cela soit encore nécessaire, ses talents d'écrivains. 
2014 est assurément pour lui un excellent millésime !

dimanche 9 février 2014

Les mémoires d'un oeuf

De Sylvain Meunier

Aux Editions La Courte Echelle

Prenez un chat, un œuf, un meurtrier à la retraire, dessinateur à ses heures ; et obtenez un cocktail détonnant et délirant, en résumé un roman savoureux. Mais ne vous y trompez pas, si l’histoire est non seulement originale et bien structurée, elle est aussi très bien écrite.

Monsieur L’œuf en quête d’esthétique, abhorre la vulgarité. Alors que son environnement est soudain envahi par la grâce et l’innocence de Solène, le voilà paradoxalement enlaidi, par l’arrivée inopinée d’un grossier personnage.

Pour résoudre ce désagrément et maintenir l’harmonie à laquelle il prétend avoir droit, Monsieur L’œuf, loin d’être repenti,  décide de reprendre du service…
Car après tout, «quand on y songe, tuer quelqu’un ce n’est que lui faire prendre une avance sur la fatalité, puisque nous mourrons tous. On dira qu’on lui vole sa vie, mais quelle vie au juste ? Qui sait si la victime ne se serait pas découvert un cancer mortel un peu  plus tard, ou n’aurait pas péri le lendemain dans un accident de voiture ? Assassiner, ce n’est que changer une date dans un agenda »…
Alors, Monsieur L’œuf professionnel en l’art de faire passer de vie à trépas ceux qui le dérangent, fomente un plan pour se débarrasser de l’odieux individu.
Mais finalement à qui servira ce plan ? C’est ce que je vous conseille de découvrir dans ce petit ouvrage d’une plume exceptionnelle et rempli d’humour.

Habituellement je suis plus attachée à l’originalité de l’histoire qu’au style mais Sylvain Meunier excelle dans les deux exercices. Raison supplémentaire pour ne pas passer à côté de ce petit bijou. C’est une belle découverte !


mercredi 5 février 2014

L'instant précis où les destins s'entremêlent



D'Angélique Barbérat

Aux Editions de l’Epée en version numérique

Aux Editions Michel Lafon en livre broché






Coryn, unique fille d’une fratrie de 11 enfants, vit sous la domination de ses parents et de ses nombreux frères.
Douée et envieuse de poursuivre ses études, elle redoute de devoir arrêter l’école et masque tant bien que mal les transformations physiques du passage de l’adolescence à l’âge adulte. Mais ses craintes se confirment lorsque, peu après ses 16 ans, son père la contraint à cesser ses études pour travailler.
Voyant en elle, une jeune fille en perdition si elle ne se marie pas rapidement, il se met en quête d’un homme pour elle.
Un jour, une aubaine tombée du ciel du nom de Jake, va croiser la route de cette très belle jeune fille et l’épouser pour le plus grand bonheur de ses parents.
Le père de Coryn se laissera séduire par l’allure de ce jeune homme à l’avenir prometteur sans s’inquiéter de connaitre sa véritable nature.
Sous le charme de cet homme amoureux qui lui permet de fuir la cellule familiale, mais sans vraiment l’avoir décidé, Coryn glissera de l’emprise de ses parents vers celle de Jack, qui fera d’elle sa propriété.
Très vite, elle devra faire face à  la tyrannie de ce mari exclusif et pervers.  Et n’ayant jamais eu d’autre choix que celui de se taire, elle subira les coups, appréhendant chaque faux pas déclencheur d’un prochain calvaire.

Un jour cependant, le destin mettra Coryn sur la route de Kyle, musicien mondialement connu, à l’âme sensible et au passé douloureux.
Et cet instant précis où leurs destins vont s’entremêler changera à tout jamais le cours de leur vie.


A la seule lecture du titre, je savais que l’ouvrage ne me laisserait pas indifférente. Il présumait déjà d’une histoire peu banale. Ces instants éphémères que le destin met sur notre route et qui vont déjouer le cours normal de la vie sont des moments magiques de bonheur ou de malheur. Avec l’arrivée inopinée de Jack dans la vie de Coryn venu la délivrer du poids familial et la rencontre soudaine et accidentelle avec Kyle qui bouleversera sa vie, c’est bien de cela dont nous parle Angélique Barbérat. Des instants où la vie bascule et nous laisse entrevoir un autre possible.

L’auteur réussit avec prouesse à aborder le sujet dramatique de la violence conjugale et du harcèlement psychologique sans jamais tomber dans le pathos. Des scènes intenses d’agressivité ou au contraire d’amour, décrites avec beaucoup d’émotion, embarquent le lecteur dans un roman qu'il a bien du mal à quitter une fois la dernière page tournée.

Ce livre est arrivé un peu par hasard dans ma bibliothèque… Devrais-je plutôt dire que le destin m’a offert la chance de croiser la route de cet ouvrage ? Sans cela, je n’aurais jamais eu le plaisir de découvrir cette magnifique histoire qui reste mon coup de cœur de ce début d’année.