mardi 27 août 2013

Cherchez la femme d'Alice Ferney

Aux Editions Actes Sud

Résumé de l’éditeur :

Serge est brillant, entreprenant, narcissique. Marianne est sincère, ardente, déterminée au bonheur. Cherchez la femme raconte « l’histoire totale » de leur couple. Sous les yeux du lecteur, il se forme, s’établit, procrée, s’épanouit, subit l’épreuve du temps et la déchirure de l’infidélité…
Nos destinées affectives sont-elles libres ? De quel poids pèsent les rêves et les échecs de la génération précédente ? Quelles forces obscures (le passé, l’enfance, l’origine sociale, l’argent, la carrière professionnelle, les convictions, les valeurs) sont à l’œuvre dans la vie conjugale et menacent cet entrelacs fragile de deux solitudes engagées l’une envers l’autre ?
En forme d’étude de caractère, Cherchez la femme est un livre captivant, plein d’intelligence et d’humour, qui démonte a posteriori les mécanismes délicats d’un mariage et, ce faisant, dévoile à ses personnages les secrets de leur modeste épopée. Avec une écriture passionnée, Alice Ferney observe le stupéfiant voyage du couple, ses ravissements et ses dépressions, ses défenses et ses décompositions. Elle retrouve les mots de l’illusion et  ceux de la querelle, ceux du rapprochement et ceux de la défaite. Ceux surtout qui permettent de répondre à la question que l’état de grâce renvoie toujours aux lendemains : qu’est-ce que « s’aimer » veut dire ?

Mon avis :

J’ai découvert cet auteur avec son livre intitulé « La conversation amoureuse », et suis désormais une de ses fidèles lectrices.

Alice Ferney a la faculté de disséquer le genre humain. Elle fouille dans la vie des gens et analyse avec précision et habileté les états d’âme et les sentiments des individus.

Dans « Cherchez la femme », elle met en scène la vie d’une famille sur plusieurs générations, en sept chapitres aux titres éloquents.

Fils de Nina,
La femme de sa vie,
L’épreuve des faits,
Coup de foudre inopportun
Les meilleures choses ont une fin
Refaire sa vie
Et la mort qui sépare

Elle s’attache à nous montrer combien le poids de l’héritage familial peut impacter une vie et peser sur son avenir.
La façon dont se comportent les parents avec les enfants qu’il s’agisse d’amour ou de désamour entraîne des conséquences dans la construction de la personnalité du futur adulte.  
Elle décrit encore avec une étonnante lucidité les séquelles dues à l’éducation que l’on reçoit, la difficulté de s’en extraire si tant est que l’on se rende vraiment compte des conséquences qu’elles entraînent.

Ce livre confirme  à nouveau cet incroyable talent d’introspection de l’humain, écrit avec élégance dans un style irréprochable.


mardi 20 août 2013

Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson

Cet écrivain voyageur nous embarque dans sa retraite sur les rives du lac Baïkal où durant six mois, il a fui le monde  pour expérimenter une vie de solitude au cœur de la forêt Sibérienne dans une simple cabane en bois.
Avec ses chiens pour tout compagnon, quelques caisses de Vodka et la présence occasionnelle de mésanges et d’ours, Sylvain Tesson a vécu replié sur lui-même. Ce fut une véritable communion avec la nature puisqu’il lui a fallu pour survivre, tirer l’eau du fleuve, pécher pour se sustenter et couper du bois pour se chauffer. Ses journées ont défilé  au rythme  d’une horloge naturelle celle de l’aurore et du crépuscule. Riche d’une grande quantité de livres qu’il a fait suivre de France, il a passé la majorité de son temps, à la lecture de ces ouvrages pour comprendre le monde qui l’entoure.
Dans l’isolement de la Sibérie, Sylvain Tesson se livre à une introspection et se libère du superflu, loin de toute pollution mercantile, visuelle et sonore.
Il faut beaucoup de courage pour vivre un tel isolement. Je l’envierais presque si le projet ne me paraissait pas si fou. Quelques lecteurs ont rapporté que Tesson n’envoyait aucun message précis à travers ce livre mais seulement la description de son quotidien. Je pense, au contraire,  qu’il met en exergue la superficialité de nos vies, leur manque d’intérêt, notre urgence à tout vivre vite, à consommer à outrance et sans plaisir.
Peut-être voulait-il simplement nous amener à nous rappeler que l’essentiel n’est pas ce que nous croyons.
Un poète rêveur, un brin utopiste, dont la narration appelle à la méditation. Un livre que je lirai à nouveau avec plaisir.

Quelques extraits :

 « C’est fou ce que l’homme accapare l’attention de l’homme. La présence des autres affadit le monde. La solitude est cette conquête qui vous rend jouissance des choses. »
« L’éventail des choses à accomplir est réduit. Lire, tirer de l’eau, couper le bois, écrire et verser le thé deviennent des liturgies. En ville, chaque acte se déroule au détriment de mille autres. La forêt resserre ce que la ville disperse. »
« C’est le soir, il est 9 heures, je suis devant la fenêtre. Une lune timide cherche une âme sœur mais le ciel est vide. Moi qui sautais au cou de chaque seconde pour lui faire rendre gorge et en extraire le suc, j’apprends la contemplation. Le meilleur moyen pour se convertir au calme monastique est de s’y trouver contraint. S’assoir devant la fenêtre le thé à la main, laisser infuser les heures, offrir au paysage de décliner ses nuances, ne plus penser à rien et soudain saisir l’idée qui passe, la jeter sur le carnet de notes. Usage de la fenêtre : inviter la beauté à entrer et laisser l’inspiration sortir. »
« A Paris, je ne m’étais jamais trop penché sur mes états intérieurs. Je ne trouvais pas la vie faite pour tenir les relevés sismographiques de l’âme. Ici, dans le silence aveugle, j’ai le temps de percevoir les nuances de ma tectonique propre. Une question se pose à l’ermite : peut-on se supporter soi-même ? »
« L’homme libre possède le temps. L’homme qui maîtrise l’espace est simplement puissant. En ville, les minutes, les heures, les années nous échappent. Elles coulent de la plaie du temps blessé. Dans la cabane, le temps se calme. Il se couche à vos pieds en vieux chien gentil et, soudain on ne sait même plus qu’il est là. Je suis libre parce que mes jours le sont. »



samedi 10 août 2013

Le dîner de Herman KOCH


Aux Editions 10/18 
et aux Editions Belfond

Sordide…. C’est le premier mot qui m'est venu à l’esprit lorsque j’ai refermé ce livre. Une histoire qui dérange et dont les protagonistes aux personnalités troublantes indisposent le lecteur.
Herman Koch nous entraine dans un thriller psychologique au cours d’un dîner dans un restaurant branché d’Amsterdam. Deux frères aux tempéraments radicalement différents se donnent rendez-vous pour discuter du sort de leur progéniture. Si les conversations au début du dîner sont légères et sans consistance, celles de la fin sont moins anodines. L’issue est inéluctable,  il faut aborder le sujet qui a motivé ce dîner. Un drame… Un drame commis par leurs deux enfants.

L’auteur dévoile les turpitudes de ces deux familles, et le dîner devient  la scène de théâtre d’un déballage de mensonges, de mesquineries et de faux semblants sur leur vie et celle de leurs enfants.
Si Serge est rongé par l’ambition, Paul, ne l’est que par la violence latente qui couve chez lui. Ces deux frères que tout oppose  vont devoir composer pour sauver leurs fils respectifs d’un acte de violence, sans soupçonner un instant que le fils adoptif de Serge mène la danse à leur insu.
Paul  le cynique violent et Serge l’ambitieux  égoïste se retrouvent dans la même galère et pourtant leurs réactions  sont à l’imagine de leur personnalité : en parfaite opposition.

Cet ouvrage nous amène à nous interroger sur  ce que nous ferions pour protéger les nôtres contre l’opinion publique et la prison. Jusqu’où serions-nous capables d’aller pour sauver nos proches? Entre justice et amour que choisirions-nous ?

Beaucoup de noirceur dans ce livre. Noirceur et bassesse de l’homme. Une histoire qui fait froid dans le dos, mais qui mérite d’être lue.