mardi 20 août 2013

Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson

Cet écrivain voyageur nous embarque dans sa retraite sur les rives du lac Baïkal où durant six mois, il a fui le monde  pour expérimenter une vie de solitude au cœur de la forêt Sibérienne dans une simple cabane en bois.
Avec ses chiens pour tout compagnon, quelques caisses de Vodka et la présence occasionnelle de mésanges et d’ours, Sylvain Tesson a vécu replié sur lui-même. Ce fut une véritable communion avec la nature puisqu’il lui a fallu pour survivre, tirer l’eau du fleuve, pécher pour se sustenter et couper du bois pour se chauffer. Ses journées ont défilé  au rythme  d’une horloge naturelle celle de l’aurore et du crépuscule. Riche d’une grande quantité de livres qu’il a fait suivre de France, il a passé la majorité de son temps, à la lecture de ces ouvrages pour comprendre le monde qui l’entoure.
Dans l’isolement de la Sibérie, Sylvain Tesson se livre à une introspection et se libère du superflu, loin de toute pollution mercantile, visuelle et sonore.
Il faut beaucoup de courage pour vivre un tel isolement. Je l’envierais presque si le projet ne me paraissait pas si fou. Quelques lecteurs ont rapporté que Tesson n’envoyait aucun message précis à travers ce livre mais seulement la description de son quotidien. Je pense, au contraire,  qu’il met en exergue la superficialité de nos vies, leur manque d’intérêt, notre urgence à tout vivre vite, à consommer à outrance et sans plaisir.
Peut-être voulait-il simplement nous amener à nous rappeler que l’essentiel n’est pas ce que nous croyons.
Un poète rêveur, un brin utopiste, dont la narration appelle à la méditation. Un livre que je lirai à nouveau avec plaisir.

Quelques extraits :

 « C’est fou ce que l’homme accapare l’attention de l’homme. La présence des autres affadit le monde. La solitude est cette conquête qui vous rend jouissance des choses. »
« L’éventail des choses à accomplir est réduit. Lire, tirer de l’eau, couper le bois, écrire et verser le thé deviennent des liturgies. En ville, chaque acte se déroule au détriment de mille autres. La forêt resserre ce que la ville disperse. »
« C’est le soir, il est 9 heures, je suis devant la fenêtre. Une lune timide cherche une âme sœur mais le ciel est vide. Moi qui sautais au cou de chaque seconde pour lui faire rendre gorge et en extraire le suc, j’apprends la contemplation. Le meilleur moyen pour se convertir au calme monastique est de s’y trouver contraint. S’assoir devant la fenêtre le thé à la main, laisser infuser les heures, offrir au paysage de décliner ses nuances, ne plus penser à rien et soudain saisir l’idée qui passe, la jeter sur le carnet de notes. Usage de la fenêtre : inviter la beauté à entrer et laisser l’inspiration sortir. »
« A Paris, je ne m’étais jamais trop penché sur mes états intérieurs. Je ne trouvais pas la vie faite pour tenir les relevés sismographiques de l’âme. Ici, dans le silence aveugle, j’ai le temps de percevoir les nuances de ma tectonique propre. Une question se pose à l’ermite : peut-on se supporter soi-même ? »
« L’homme libre possède le temps. L’homme qui maîtrise l’espace est simplement puissant. En ville, les minutes, les heures, les années nous échappent. Elles coulent de la plaie du temps blessé. Dans la cabane, le temps se calme. Il se couche à vos pieds en vieux chien gentil et, soudain on ne sait même plus qu’il est là. Je suis libre parce que mes jours le sont. »



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